L’eau stagnante, un danger encore méconnu
Les gestionnaires de bâtiments ou de réseaux de distribution d’eau potable sont tenus d’offrir aux usagers et aux citoyens une eau potable de qualité. Or, la présence d’eau stagnante dans une portion d’un réseau d’eau potable peut représenter un risque important pour la santé.
On retrouve de l’eau stagnante dans tous les réseaux de distribution d’eau potable, dans les bâtiments comme dans les aqueducs. Selon le degré de stagnation, l’eau peut avoir une texture visqueuse, être malodorante ou encore agir comme incubateur dans le développement de bactéries, dont la legionella. Pour ces raisons, il est impératif d’identifier les conduites mortes de façon à éliminer toute présence d’eau stagnante.
Un audit du réseau d’eau potable permet d’identifier les sources de danger dues à la présence d’eau stagnante. Il est ensuite possible de concevoir des solutions visant à corriger une installation déficiente et potentiellement dangereuse.
Des exemples concrets
Tout bâtiment évolue au fil du temps. Ces changements peuvent affecter directement ou indirectement le réseau de plomberie et ainsi contribuer à la présence d’eau stagnante. En voici quelques exemples :
- une conduite condamnée à la suite de travaux de rénovation;
- une application qui n’est plus utilisée, mais demeure raccordée au réseau de distribution, comme une conciergerie, un lavabo ou une fontaine;
- une conduite de contournement en cas d’urgence;
- une conduite entre deux bâtiments contigus;
- un réseau d’eau mitigée en circuit fermé peu sollicité, notamment des douches d’urgence;
- un étage fermé ou en rénovation majeure pour une longue période ou encore un hôtel dont le taux d’occupation est faible lors de la saison morte;
- un changement de vocation du bâtiment, tel que la conversion d’un immeuble commercial qui consommait une grande quantité d’eau en édifice à condos.
Les aqueducs municipaux sont également vulnérables à la présence d’eau stagnante, principalement en raison d’un faible débit. Une accumulation peut aussi se créer dans les situations suivantes :
- une conduite d’une dimension supérieure aux besoins actuels en vue d’alimenter de futurs ensembles résidentiels;
- une conduite de contournement partagée entre deux municipalités et utilisée en cas d’urgence;
- un réseau surdimensionné pour suffire à la demande en cas d’incendie;
- une portion du réseau inutilisée en raison de la fermeture d’une usine sur le territoire.
En outre, depuis quelques années, plusieurs initiatives ont vu le jour afin de diminuer la consommation d’eau, notamment la mise en œuvre de divers programmes d’économie de l’eau potable et l’installation de composantes de plomberie à faible consommation. Ces programmes ont leur raison d’être et les municipalités doivent poursuivre leurs efforts en ce sens. Toutefois, certains de ces systèmes contribuent à réduire la circulation de l’eau dans les conduites, ce qui peut causer la stagnation. Les concepteurs doivent de plus en plus tenir compte de cet aspect lors de l’élaboration d’un réseau de façon à promouvoir la circulation de l’eau dans des conduites de dimensions appropriées, sans toutefois la gaspiller.
Les solutions
Diverses solutions visant à éliminer l’eau stagnante peuvent être mises en place. Voici quelques pistes :
- posséder un plan précis de l’ensemble des conduites d’un réseau de distribution et le tenir à jour lors de travaux de réfection;
- concevoir des réseaux de distribution en boucle fonctionnant grâce à une pompe de circulation;
- créer des boucles de circulation pour tous les types d’eau : froide, chaude, procédée, etc.;
- installer des sondes de mesure de la qualité de l’eau mesurant la quantité de chlore ou de toute autre particule indésirable;
- vidanger les conduites d’eau stagnante à intervalles réguliers afin de faire circuler l’eau.
- éliminer les conduites désuètes à la suite de travaux de rénovation.
Des modifications à un réseau d’eau peuvent s’avérer coûteuses et difficilement réalisables dans un environnement existant. Les correctifs doivent alors être mis en œuvre projet par projet, selon le niveau de risque évalué durant l’analyse du bâtiment. La vidange des conduites constitue un moyen de prévention facile et accessible. Cela permet d’éviter que de l’eau stagne dans des portions sous-utilisées du réseau et ne nécessite aucun travail invasif.
La réglementation
De plus en plus conscients et préoccupés par les risques associés à la prolifération de bactéries dans les réseaux de distribution d’eau potable, plusieurs organismes nord-américains se sont penchés sur le sujet. Le groupe NSF, qui élaborent des normes de qualité et de sécurité, travaille actuellement - en collaboration avec un comité auquel siège Santé Canada – à élaborer la norme 444 : Prevention of Injury and Disease Associated with Building Water Systems Standard. Cette norme, attendue en 2018, aura pour but de prévenir les contagions développées et véhiculées dans les réseaux d’eau des bâtiments. Ce document fera office de référence afin de concevoir des réseaux de distribution d’eau plus sécuritaires pour les usagers.
D’autres problèmes font surface, lesquels ne peuvent être ignorés puisqu’ils nuisent à la santé publique. L’eau stagnante dans les conduites présente ainsi un risque non négligeable.
L’eau potable fait de plus en plus partie des enjeux prioritaires pour l’ensemble des paliers gouvernementaux, dont les administrations municipales. De nombreux programmes visant à économiser cette ressource ont vu le jour dans les dernières années. Toutefois, d’autres problèmes font surface, lesquels ne peuvent être ignorés puisqu’ils affectent la santé publique. L’eau stagnante dans les conduites présente ainsi un risque non négligeable. Tôt ou tard, les ingénieurs en plomberie et aqueducs devront repenser la conception des réseaux de distribution d’eau potable pour tenir compte de cet aspect afin de fournir une eau de qualité à l’ensemble des usagers.
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