Santé publique: l'enjeu d'un programme efficace de raccordements croisés

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Le Code national de la plomberie et le Code de sécurité de la Régie du bâtiment du Québec sont unanimes et cohérents : tous les réseaux d'eau potable des bâtiments ICI (institutions, commerces et industries) au Québec doivent être protégés par des dispositifs antirefoulement, selon la norme CSA B64.10. De plus, tous les dispositifs antirefoulement vérifiables doivent être certifiés fonctionnels annuellement selon la norme CSA B64.10.1. Depuis 2007, la Régie du bâtiment encourage tous les ingénieurs, entrepreneurs et propriétaires à rendre les bâtiments québécois conformes en appliquant cette norme en vigueur depuis les années 1990. Mais qu'en est-il en réalité? Où en est le Québec?

Puisque les organismes régionaux et provinciaux ne tiennent aucune statistique sur la mise à niveau des réseaux de plomberie, pourquoi ne pas comparer la situation québécoise aux initiatives américaines? Le comité de l'AWWA (American Water Works Association) consacré au contrôle des raccordements croisés (l'AWWA CCC Committee), qui est composé d'experts américains et canadiens, a sondé les fournisseurs d'eau. Les résultats du sondage ont été publiés en 2018 et certaines conclusions intéressantes sont tirées de cette initiative. En voici les grandes lignes.

Sondage national

En 2017, aux États-Unis, l'AWWA a mené un sondage national auprès des fournisseurs d'eau. En tout, 724 organisations réparties dans 50 États y ont répondu. Les objectifs étaient de mesurer la quantité et la qualité des programmes de contrôle des raccordements croisés présentement imposés par les fournisseurs d'eau et d'explorer une corrélation entre le niveau de conformité et la taille du réseau d'aqueduc. De plus, le sondage a permis de déterminer plus précisément les besoins et les défis liés à l'implantation d'un programme de contrôle en fonction des investissements requis, de l'imposition des lois et de la formation des clients.

La norme canadienne

Bien que le sondage ne concerne que les États-Unis, le comité a tenu à souligner la clarté de la norme canadienne CSA B64.10 et a vanté sa précision. Elle est en effet un meilleur guide en ce qui a trait à l'indication de la protection requise à l'entrée d'eau potable selon la vocation d'un bâtiment ou de la protection exigée selon le risque de l'application au point d'usage.

Quelques surprises

Une des révélations du sondage est que le manque de connaissances et de mise en place de programmes est généralisé à toutes les tailles de réseaux de distribution d'eau, et non seulement aux plus petits. Les répondants qui ont implanté un programme affirment qu'au moins une personne y est attitrée. Toutefois, plusieurs autres répondants qui n'ont pas de programme officiel se fient uniquement aux codes et aux lois en vigueur. Ils nourrissent ainsi un doute sur la rigueur et l'assiduité des propriétaires de bâtiments à se conformer aux règlements.

Bien que les fournisseurs d'eau exigent l'installation du dispositif antirefoulement à l'entrée d'eau du bâtiment afin de protéger le réseau d'aqueduc public, le propriétaire a aussi un rôle à jouer. En effet, celui-ci doit se préoccuper de la santé des occupants en identifiant les sources potentielles de contamination présentes dans le bâtiment. Il doit isoler celles-ci de l'eau potable à l'aide d'un dispositif antirefoulement. Même si les répondants insistent seulement sur le contrôle à l'entrée d'eau, ils affirment que les programmes les plus efficaces et les plus respectueux de la santé publique sont ceux qui obligent la certification annuelle des dispositifs à l'entrée d'eau ainsi que dans le bâtiment.

L'utilité des vérificateurs

Les fournisseurs qui ont implanté un programme utilisent tous des vérificateurs formés, surveillés et certifiés selon un programme régional ou national reconnu. Le Canada, y compris le Québec, peut se féliciter d'avoir un programme de formation uniforme d'un océan à l'autre. Au Québec, tous les vérificateurs qui pratiquent cette discipline sont inscrits au registre québécois géré par la section québécoise de l'AWWA.

Quelques recommandations et conclusions

Tous les fournisseurs d'eau sont conscients qu'il faut minimiser les incidents de contamination d'eau dans les réseaux de distribution. Plusieurs des enjeux actuels ont d'ailleurs été confirmés dans le sondage. Les plus importants enjeux sont les suivants ;

  • Chaque incident de contamination du réseau de distribution d'eau potable doit être documenté et les conclusions du rapport doivent être facilement accessibles pour tous.
  • Chaque fournisseur d'eau doit pouvoir compter sur un budget récurrent afin de définir, de développer et de maintenir un programme en place comprenant une équipe attitrée, de la formation, un suivi des dossiers, etc.
  • Les autorités doivent améliorer l'éducation du public par divers programmes de communication afin de le sensibiliser aux problèmes occasionnés par les raccordements croisés risqués et à l'importance de préserver l'eau potable.

Bien que des programmes de prévention de la contamination de l'eau potable soient en place, les fournisseurs d'eau doivent demeurer vigilants et continuer d'éduquer leurs clients à la vulnérabilité des réseaux autant de distribution municipaux (public) qu'à l'intérieur d'un bâtiment (privé). Au Québec, les installations municipales de distribution d'eau sont nombreuses, complexes et exposées quotidiennement à de nombreuses variations de leur environnement. Il est donc important que tous travaillent ensemble afin de sensibiliser la population au fait que l'eau est une ressource essentielle devant être préservée.

Pour en savoir plus : LeBas, Mitchell J., Stewart, C. et Garner, S. (2018). Status of backflow prevention and cross-connection control programs in the United States. Journal - American Water Works Association, 110(2), 48-53. Consulté en ligne à:

https://awwa.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/awwa.1003

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